Article d'actualité

« Joindre nos forces pour mieux relever le défi de la crise des droits »

Afin de surmonter la crise actuelle en matière de droits de l'homme, nous devons nous ressaisir et tâcher de mieux nous organiser, a déclaré le Directeur de la FRA à l'occasion d'un atelier qui s'est tenu le 3 avril au parlement catalan, à Barcelone.

L'atelier, organisé par l'Institut international de l'Ombudsman, a tenté d'explorer de quelle manière la progression du populisme dans le débat politique a des répercussions sur les droits de l'homme et sur les possibilités d'action des institutions de médiation. En ouverture de son allocution, le Directeur de la FRA a décrit le rôle crucial que ces institutions peuvent jouer en tant qu'organes de défense des droits et que championnes des valeurs dans la vie publique.

Tout en exposant les difficultés qui caractérisent actuellement le climat dans lequel les institutions de médiation ainsi que les nombreux promoteurs et protecteurs des droits doivent opérer, il a proposé des voies possibles pour aller de l'avant. Il a notamment évoqué la nécessité urgente de s'attaquer aux inégalités croissantes qui frappent toute l'Europe et contribuent au mal-être de la population. Or, cette situation a précisément pour résultat que beaucoup en viennent à leur tour à se désintéresser de ces droits. L'Europe doit par conséquent trouver les moyens lui permettant de renouer le dialogue avec l'opinion publique, afin de montrer à tous que les droits sont importants pour eux comme pour leurs familles. Il a ainsi cité à titre d'exemple les droits des personnes âgées. Chacun connaît autour de lui une personne âgée. Celle-ci peut-être son père, sa grand-mère, ou encore son voisin. En utilisant ce type d'exemples, nous pouvons illustrer le fait que les droits ne concernent pas qu'une minorité, mais qu'ils s'appliquent à la vie quotidienne de tout un chacun. Les institutions de médiation peuvent jouer un rôle clé en tant qu'acteurs de première ligne en vue de convaincre le public que les droits les concernent et les protègent.

En plus de cette dynamique de création d'un nouveau lien avec tout un chacun, le Directeur a évoqué la nécessité d'agir au niveau local. Une approche uniforme, tant à l'échelle d'un pays qu'à celle d'un État, ne saurait réussir, a-t-il déclaré. Sur ce point, il a particulièrement souligné l'importance de travailler avec les communautés locales, sur la base d'approches fondées sur les droits. La FRA reconnaît cet aspect, qui est la raison pour laquelle elle associe directement les maires à son action et contribue à combler le fossé qui isole les collectivités locales s'agissant d'impliquer les communautés roms participant aux décisions qui les affectent de manière directe.

Se penchant plus spécifiquement sur la menace « pernicieuse » que crée le populisme, il a évoqué la nécessité de réfuter les mensonges qui sont servis à l'opinion publique. Il importe sur ce point que nous nous attachions à tenir tête à ces mensonges et à les contrer, puis à les éradiquer rapidement avant qu'ils ne prennent racine. Il a cité à l'appui l'exemple des agressions de Cologne contre des femmes pendant la nuit du Nouvel An 2015-2016. Certains furent très prompts à montrer du doigt les migrants, en affirmant que les violences à l'encontre des femmes était un phénomène importé par les personnes récemment arrivés. La FRA avait été en mesure de réfuter ces allégations grâce à son étude sur les violences fondées sur le genre, réalisée à l'échelle de l'UE et montrant à quel point ces violences sont un problème autochtone, la plupart des femmes ayant été agressées par des personnes qu’elles connaissaient.

Tout en évoquant la nécessité de renouer le lien avec l'opinion publique, le Directeur a rappelé aux personnes présentes que nous ne devrions jamais perdre de vue les personnes vulnérables, marginalisées, l'Autre. Il a déploré que malgré l'augmentation du nombre de crimes et délits motivés par la haine, les enquêtes de police et les poursuites judiciaires ne suivent pas le rythme ; il convient clairement, selon lui, de remédier à ce déséquilibre.

Dans toutes ces questions, la FRA est disposée à aider les décideurs politiques à tous les échelons. Elle continuera de fournir en temps utile les données pertinentes permettant aux décideurs de définir des politiques éclairées. Les recherches socio-juridiques de pointe ainsi que les avis juridiques de l'Agence sont combinés au déploiement de son personnel sur le terrain, vers les hotspots situés en Grèce, mais aussi aux rapports relatifs aux préoccupations en matière de droits fondamentaux dans 14 États membres situés en première ligne, que la FRA publie mensuellement.

Inquiète de la déconnexion croissante avec la question des droits, l'agence est également en train d'explorer des voies possibles en vue de communiquer au mieux au sujet des droits, par un dialogue avec des personnalités issues de divers domaines, comme les neurosciences ou le marketing. Elle continuera également à travailler main dans la main avec ses partenaires engagés dans la défense des droits de l'homme, tels que les institutions de médiation.

Il a ajouté en guise de conclusion que la crise avait amené plus de clarté quant à ce qui est inadéquat, ou ce qui est au contraire nécessaire : « ainsi, il ne s'agit pas de nous laisser aller à un sentiment décourageant de désarroi, mais de nous ressaisir afin de mieux nous organiser et de poursuivre nos travaux ».